Les progrès substantiels en matière d'électronique et de photonique au cours des dernières décennies ont permis d'importantes améliorations dans les technologies de traitement des données, qui ont significativement amélioré nos vies.
La plasmonique désigne la manipulation à l'échelle nanométrique (milliardième de mètre) de signaux optiques au niveau d'interfaces métal-diélectrique. Inspirée par la photonique, la plasmonique exploite les propriétés distinctives de nanostructures métalliques qui permettent de guider les signaux lumineux à des échelles quasi atomiques.
L'intégration de la photonique et de l'électronique classiques avec la plasmonique sur une seule puce semi-conductrice présente des avantages importants, permettant d'aboutir à des puces informatiques et des dispositifs de communication optique ultrarapides, et d'équiper des capteurs et microscopes ultrasensibles.
Lorsque le professeur Atwater de Caltech a introduit pour la première fois le concept de la plasmonique en 2007, il a prédit que cette technologie engendrerait une multitude d'applications, allant de la biosurveillance ultrasensible au bouclier d'invisibilité.
Quelle que soit l'application, la plasmonique repose sur la manipulation d'interactions entre des champs électromagnétiques et des électrons libres au niveau d'interfaces métal-diélectrique ; un diélectrique étant un isolant (comme le verre ou l'air) qui peut être polarisé par l'application d'un champ électrique. Les électrons libres, responsables des propriétés électriques et optiques des métaux, oscillent sous l'effet de champs électromagnétiques (comme la lumière), entraînant un phénomène appelé plasmons de surface.
À l'échelle nanométrique, les électrons libres sont confinés dans de petites régions de l'espace, ce qui limite la gamme de fréquences à laquelle ils peuvent vibrer. En interagissant avec de la lumière, ils absorbent la lumière qui correspond à leurs fréquences de vibration (tout en réfléchissant le reste de la lumière), ce qui signifie qu'ils sont en résonance, d'où le terme « résonance des plasmons de surface » (SPR). La SPR peut être utilisée dans les nanotiges, les nanofils, la nanophotonique et d'autres applications en nanotechnologie.
Notre société axée sur les données a parcouru un long chemin depuis les premiers semi-conducteurs à puce, produisant des processeurs toujours plus petits et plus rapides. Néanmoins, la diminution constante de la taille de ces dispositifs a créé de nouveaux défis, notamment des limitations dues aux problèmes thermiques et aux vitesses de traitement.
Les interconnexions optiques, avec leur large bande passante (capacité de transport de données), offrent une solution prometteuse. Cependant, la limite de diffraction de la lumière joue un rôle important dans la limitation de la réduction de la taille des composants photoniques, jusqu'à environ la moitié de la longueur d'onde de la lumière. En conséquence, les dispositifs photoniques sont généralement d'un à deux ordres de grandeur plus grands que leurs équivalents électroniques.
Des efforts considérables sont déployés pour exploiter les propriétés uniques des plasmons de surface afin de combiner l'efficacité de taille de l'électronique avec l'efficacité en termes de données de la photonique.
Puisque les pertes ohmiques n'amortissent la propagation des plasmons de surface qu'après quelques millimètres de déplacement, des nanostructures plasmoniques, construites à partir de nanoparticules plasmoniques telles que le graphène, les oxydes métalliques et les nitrures, sont étudiées.
La chaleur constitue un autre défi. Elle peut affecter la longueur de propagation et l'amplitude des signaux plasmoniques.
Les nanostructures et géométries métalliques présentant la bonne combinaison de propriétés électriques et optiques peuvent résoudre ces défis. En effet, les nanostructures métalliques en cuivre, argent, aluminium, or et autres matériaux facilitent la propagation de polaritons de plasmons de surface (SPP).
Les SPP sont des oscillations électroniques résonantes qui se propagent au niveau d'interfaces métal-diélectrique. Ils engendrent des interactions lumière-matière fortes, capables d'amplifier les effets optiques faibles dans les applications optoélectroniques.
Les SPP peuvent être considérés comme des types spéciaux d'ondes lumineuses. Par conséquent, les interconnexions métalliques qui supportent la propagation de ces ondes au niveau des interfaces diélectrique-métal se comportent comme des guides d'ondes optiques, ou des guides d'ondes plasmoniques.
Les SPP sont représentés par un vecteur d'onde complexe. La partie imaginaire de ce vecteur est inversement proportionnelle à la longueur de propagation des SPP, tandis que la partie réelle est proportionnelle au confinement.
L'intégration pratique des plasmons de surface dans la conception des circuits dépend de l'équilibre de la relation inverse entre la longueur de propagation et le confinement. Idéalement, les guides d'ondes plasmoniques maximisent à la fois le confinement et la longueur de propagation des plasmons de surface pour un effet optimal.
Les pertes par dissipation qui résultent naturellement de la propagation de polaritons de plasmons de surface peuvent être contrées avec une amplification de gain ou en intégrant des éléments photoniques tels que des fibres, aboutissant à des guides d'ondes plasmoniques hybrides.
Les guides d'ondes plasmoniques présentent des modalités de sous-longueurs d'onde, inférieures à la limite de diffraction de la lumière. L'idée que les modalités de propagation des SPP à des longueurs d'onde plus petites que celles de la lumière sont possibles a suscité un immense enthousiasme, ouvrant la voie à des dispositifs à l'échelle des puces capables de traitement d'informations à l'échelle nanométrique à des fréquences optiques.
Les types courants de guides d'ondes plasmoniques comprennent les guides d'ondes MIM (métal-isolant-métal), IMI (isolant-métal-isolant), CPP (channel plasmon polariton), et GPP (gap plasmon polariton).
Un métamatériau est un matériau composite cronçu pour afficher des propriétés qui ne sont pas observées dans ses matériaux de base. Les métamatériaux tirent leurs propriétés de leurs tailles, formes, géométries et orientations uniques qui leur donnent la capacité de plier, bloquer, absorber ou intensifier des ondes électromagnétiques de manière innovante et bénéfique. Les métamatériaux sont disposés en motifs répétitifs à des longueurs d'onde plus petites que les phénomènes qu'ils cherchent à influencer.
Dans les métamatériaux plasmoniques, ce sont les plasmons de surface qui confèrent à ces matériaux leurs propriétés uniques. Sous certaines conditions, la lumière incidente se couple avec les plasmons de surface au niveau d'interfaces métal-dielectrique pour former des ondes électromagnétiques auto-entretenues et propagatives appelées polaritons de plasmons de surface (SPP).
Ces SPP tirent leurs propriétés de la structure des nanoparticules métalliques sous-jacentes. Les SPP affichent des caractéristiques ajustables à des longueurs d'onde plus courtes que la lumière incidente. Parmi les exemples de métamatériaux plasmoniques, on trouve les nanoparticules d'or (nanocubes) ainsi que les nanocoques d'argent et d'or, organisés en arrangements périodiques.
Les métamatériaux plasmoniques tirent leurs propriétés des arrangements de nanoparticules métalliques à des échelles sous-longueur d'onde, permettant aux ingénieurs de manipuler des propriétés telles que la dispersion, la permittivité, la perméabilité et l'indice de réfraction pour atteindre une variété d'applications novatrices.
Lorsque la lumière passe d'un milieu à un autre, par exemple de l'air à l'eau, elle se courbe en traversant la normale, qui est un plan perpendiculaire à la surface. Dans les matériaux à indice négatif, cette courbure se produit dans la direction opposée, ce qui signifie que l'énergie électromagnétique de la lumière est transportée dans une direction opposée à celle de son front d'onde de propagation.
Comme l'indice de réfraction du matériau est lié à sa permittivité, qui influence à son tour la longueur de propagation électromagnétique, les métamatériaux à indice négatif offrent des propriétés optiques ajustables qui vont au-delà des capacités des lentilles, miroirs et dispositifs optiques conventionnels.
Les métamatériaux plasmoniques peuvent aussi être configurés pour afficher des indices de réfraction différents sur leur longueur ou leur surface. Ceux-ci peuvent être fabriqués, par exemple, en déposant un polymère synthétique, tel que le PMMA, sur une nanosurface d'or par lithographie par faisceau d'électrons.
Des métamatériaux plasmoniques à gradient d'indice ont été utilisés pour fabriquer des lentilles Luneburg et Eaton qui interagissent avec les polaritons de plasmons de surface au lieu des photons conventionnels de la lumière.
Des métamatériaux à indice négatif en trois dimensions ont également été proposés, pouvant être fabriqués par auto-assemblage, dépôt de films minces multicouches et usinage par faisceau d'ions focalisé.
L'éclairage des matériaux conventionnels, c'est-à-dire ceux ayant un indice de réfraction positif, génère une pression de rayonnement positive, ce qui signifie que le matériau est repoussé par la source de lumière. L'effet inverse se produit sur un matériau à indice négatif, ce qui signifie que le matériau est attiré vers la source lumineuse.
Cela pourrait être utilisé, par exemple, pour améliorer l'efficacité du transfert d'énergie et l'absorption de la lumière dans les sources lumineuses et les lasers, ou pour optimiser l'absorption de la lumière dans les cellules solaires à couche mince.
Les métamatériaux hyperboliques se comportent comme un métal ou un diélectrique en fonction de la direction de propagation de la lumière. Dans ce cas précis, la relation de dispersion du matériau crée un hyperboloïde, ce qui conduit (théoriquement) à des longueurs d'onde de propagation infiniment petites.
Des métasurfaces hyperboliques ont été mises en évidence sur des nanostructures d'argent et d'or. Ces structures présentent des capacités améliorées (réfraction négative, sans diffraction, etc.) pour la détection et l'imagerie. Ainsi ces structures offrent des applications prometteuses dans le traitement de l'information quantique à l'intérieur des circuits intégrés optiques.
En outre, des superréseaux hyperboliques peuvent se former à partir de la combinaison de structures de cristaux compatibles, tels que le nitrure de titane et le nitrure de scandium et d'aluminium. Contrairement à l'or et à l'argent, ces matériaux sont compatibles avec les composants CMOS existants et sont thermiquement stables à des températures plus élevées. Comme ils présentent des densités photoniques plus élevées (par rapport à l'or ou à l'argent), ils sont également des absorbeurs de lumière efficaces.
Les métamatériaux hyperboliques permettent des applications telles que des lentilles planes, offrant des capacités de détection avancées, une imagerie sans diffraction, des microscopes optiques ultrasensibles, des nano-résonateurs, et bien d'autres.
Les nanostructures résonantes présentent la force nécessaire pour les interactions lumière-matière, une forte localisation des interactions électromagnétiques et de grandes sections efficaces pour la diffusion et l'absorption. Elles peuvent servir de superlentilles hautement efficaces, de concentrateurs de lumière, de nanorésonateurs et de guides de sous-longueurs d'onde.
La plasmonique repose sur des processus optiques se produisant dans des nanostructures au niveau d'interfaces métal-diélectrique. Les polaritons de plasmons de surface sont des ondes électromagnétiques fortement confinées à ces interfaces, résultant des interactions entre des électrons libres et des photons.
Les propriétés ajustables des SPP permettent le contrôle à l'échelle nanométrique des interactions lumière-matière, établissant un pont entre les dispositifs photoniques limités par la diffraction et l'électronique à l'échelle nanométrique pour les circuits intégrés de prochaine génération.
La génération, l'amplification, le traitement et l'acheminement des signaux optiques à l'échelle nanométrique présentent de nombreuses possibilités pour des applications dans des domaines divers tels que les télécommunications, la biochimie, la récupération d'énergie et la détection.
Les exemples suivants illustrent des applications potentielles importantes des circuits intégrés hybrides plasmoniques, électroniques et photoniques.
Les matériaux plasmoniques supportant la résonance des plasmons de surface localisée (LSPR) permettent de fortes amplifications du champ électromagnétique local, améliorant ainsi considérablement les applications en spectroscopie et en détection.
L'effet PIRET (Plasmon-induced resonance energy transfer), par exemple, peut être utilisé pour améliorer l'efficacité des diodes électroluminescentes (LED), ainsi que la performance des capteurs à fluorescence.
Une application notable de la plasmonique est le développement de capteurs pour la détection de traces infimes d'agents biologiques ou chimiques. Dans un cas, des chercheurs ont enduit un nanomatériau plasmonique d'une substance qui se fixe facilement à une toxine bactérienne. La présence de cette toxine a modifié la fréquence des plasmons de surface et, par conséquent, l'angle de la lumière réfléchie, un effet mesuré avec une grande précision, permettant la détection même des traces les plus petites.
D'autres applications de la technologie plasmonique pour la détection incluent la distinction entre infections virales et bactériennes ainsi que des capteurs internes pour batteries permettant de surveiller le taux de charge et la densité de puissance.
Les capteurs SPR remplacent efficacement les techniques basées sur la chromatographie pour la détection des polluants environnementaux. La détection SPR s'est avérée aussi précise que la chromatographie pour détecter le chloroprène et produit des résultats plus rapidement.
D'autre part, la technologie SPR à fibre optique décrit l'utilisation de capteurs SPR aux extrémités de fibres optiques, facilitant le couplage de la lumière avec les plasmons de surface. Ceci permet d'obtenir des dispositifs de détection ultrasensibles et compacts, ce qui est particulièrement utile dans les applications de télédétection.
Il a été démontré que la superposition de graphène sur des nanostructures d'or améliore la performance des capteurs SPR. Le faible indice de réfraction du graphène minimise les interférences tandis que sa grande surface facilite le piégeage des biomolécules.
Ainsi, l'incorporation de graphène élargit la gamme d'applications des capteurs SPR. Il a également été montré que le graphène améliore la résistance des capteurs SPR au recuit à haute température pendant la fabrication.
Les matériaux plasmoniques du groupe de l'or, comprenant l'or, le cuivre et l'argent, ont été utilisés dans les cellules photovoltaïques et solaires. Ces matériaux, qui fonctionnent comme donneurs d'électrons et de trous, jouent un rôle crucial dans le fonctionnement des capteurs intelligents pour les réseaux IoT.
Les nanomatériaux plasmoniques peuvent également améliorer l'extraction de la lumière des LED, augmentant leur luminosité et leur efficacité, et produisant des écrans LED souples et légers à faible coût.
L'informatique optique cherche à tirer parti de la large bande passante des signaux optiques en échangeant des dispositifs électroniques avec des dispositifs de traitement de la lumière.
À titre d'exemple, en 2014, des chercheurs ont créé un commutateur optique térahertz de 200 nm fabriqué avec des matériaux plasmoniques en dioxyde de vanadium. Le dioxyde de vanadium présente la capacité de passer d'une phase opaque et métallique à une phase transparente et semi-conductrice.
Les nanoparticules de dioxyde de vanadium ont été déposées sur un substrat en verre, puis recouvertes de nanoparticules d'or qui ont agi comme une photocathode plasmonique. Par la suite, de brèves impulsions laser ont été appliquées, provoquant le transfert d'électrons libres des nanoparticules d'or vers le métamatériau en dioxyde de vanadium, entraînant des changements de phase momentanés.
Les commutateurs en dioxyde de vanadium sont compatibles avec les puces en silicium existantes et fonctionnent dans les régions du proche infrarouge et du visible du spectre. La lumière proche infrarouge est essentielle pour les télécommunications et les communications optiques, tandis que la lumière visible est indispensable pour les capteurs et les microscopes.
Les métamatériaux plasmoniques peuvent aussi contribuer au stockage de mémoire magnétique assisté par la chaleur sur des disques, en augmentant la capacité de stockage en chauffant de minuscules zones du disque lors de l'écriture.
Une application manifeste de la plasmonique de sous-longueurs d'onde se trouve dans la microscopie au-delà de la limite de diffraction de la lumière. Cette contrainte empêche les microscopes classiques (ayant un indice de réfraction positif) de discerner des objets plus petits que la moitié de la longueur d'onde de la lumière.
Des lentilles fabriquées à partir de matériaux plasmoniques à indice négatif pourraient contourner la limite de diffraction, produisant des superlentilles capables de capturer des informations spatiales au-delà de la portée des microscopes conventionnels, avec des applications dans les commutateurs optiques, les photodétecteurs, les modulateurs et les émetteurs de lumière directionnelle.
L'industrie des semi-conducteurs a fait d'énormes progrès dans la réduction des dispositifs électroniques à l'échelle nanométrique au cours des dernières décennies. Cependant, les problèmes de retard de signal représentent des défis importants pour la réalisation de circuits supérieurs à 10 GHz.
Bien que les dispositifs photoniques offrent une bande passante considérable, la diffraction restreint la taille des composants photoniques. La nanotechnologie plasmonique forme le pont entre le monde microscopique (millionièmes de mètre) de la photonique et le monde nanoscopique (milliardièmes de mètre) de l'électronique.
Le futur s'annonce prometteur pour la plasmonique, les chercheurs pouvant explorer de nouveaux métamatériaux tels que le graphène. Tant que les entreprises pourront produire des dispositifs plasmoniques robustes, fiables et à prix raisonnable, la nanotechnologie plasmonique sera le pivot essentiel qui assurera la synergie nécessaire dans la prochaine génération de cartes de circuits intégrés à plus de 10 GHz.
Le marché des matériaux plasmoniques devrait valoir près de 40 milliards de dollars d'ici 2031, contre un peu moins de 11 milliards de dollars en 2023, soit un taux de croissance annuel d'environ 15,5 %.
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